[Cinéma] JCVD

Ne me demandez pas pourquoi j’ai voulu voir ce film, je n’en connais pas moi-même la réponse. Peut-être parce que j’avais entendu, dans une conversation, parler de Jean-Claude Van Damme, après avoir discuté d’Expendables 2 avec des amis. Peut-être parce que mon esprit de contradiction a voulu soutenir que, non, JCVD n’est pas un ouf, que j’aime sa filmographie, que je trouve que certaines de ses vidéos lolesques que l’on prend un malin plaisir à tourner en dérision sur le net, ne sont pas forcément si débiles que ça. Peut-être que je voulais tout simplement en savoir plus, et que j’avais vu, du coin de l’œil, à la télé, une critique du film JCVD, plutôt positive. Bref, il me fallait voir ça et me faire un avis. Mon avis.

Le scénario

Il y a un adage un peu pourritos qui dit que les meilleurs scénar’ tiennent sur un ticket de métro. Que l’on soit d’accord ou pas, ici, c’est le cas. Ayant besoin de liquidité, notamment pour continuer de payer son avocat dans le divorce qui l’oppose à son ex-femme, et notamment pour la garde de sa fille, Jean-Claude se retrouve obligé d’aller à la Poste de sa ville natale, en Belgique, pour y faire un virement. Mais voilà qu’il se retrouve, bien malgré lui, au beau milieu d’une prise d’otage. Comble de malchance, un otage essayant de s’enfuir, un coup de feu est tiré et JCVD est aperçu par un policier à la fenêtre de la Poste, passant ainsi pour le preneur d’otage. Il n’en faut pas plus pour que les médias s’emparent de l’affaire, qu’une foule de badauds et de fans arrivent sur place et que le commissaire du coin, interprété par le très bon François Damiens, ne se retrouve rapidement débordé par la situation.

L’ambiance

On pestera contre ce filtre sépia qui nous gâche un peu le film mais qui lui donne tout de même un certain cachet. L’histoire est dévoilée sous deux points de vues différents, d’abord celui de deux vendeurs d’une boutique de DVD, puis celui de Van Damme lui-même. Le ton est résolument réaliste et je ne saurais dire si le filtre imposé y est pour quelque chose. Ce qui est sûr c’est que la caméra, parfois en mode embarquée, les dialogues, parfois à la limite de l’impro, l’accent belge à la fois stylé et marrant, participent beaucoup à l’immersion. On commence à suivre le film du coin de l’œil, et on se retrouve rapidement embarqué dans l’histoire et incapable de décrocher. Réalisme, oui, disons-le, avec un Van Damme en galère de thune, qui se fait maîtriser par des preneurs d’otages grassouillets, pas plus fort que les autres, peureux, presque tragique, bref, résolument humain.

Les personnages

On passera rapidement sur le commissaire Bruge, interprété par un François Damiens impeccable, un flic d’une petite bourgade dépassé par les événements mais qui continue à gérer l’opération, aussi bien que possible. Les autres personnages, hormis les preneurs d’otages, sont largement relégués au second plan. En fait, il faut bien avouer que tout le monde a l’air, justement, d’être Monsieur Tout le Monde, y compris Jean-Claude himself, ce qui rend le film vraiment crédible. Mais venons-en vraiment au fait : JCVD joue bien. Oui, vous pouvez ne pas me croire, continuer à penser que c’est un acteur raté, un philosophe cocaïné complètement teubé, que c’est un film masturbatoire ne tournant que sur sa personne… Mais force est de constater, qu’une fois devant l’écran, on est bluffé. Jean-Claude Van Damme joue sobrement, est toujours juste, dans une autobiographie parfois touchante. Le regard critique qu’il a sur lui, ou plutôt, que le film porte sur lui, en dit long sur le recul qu’il a sur lui-même. On s’en rend compte, par exemple, lorsque sa fille, au tribunal, refuse de vivre avec lui parce que ses camarades d’écoles se moquent de son père. De même lorsque, pris en otage, on entend la télévision, persuadée qu’il est le terroriste, passer en boucle ses vidéos célèbres de « 1+1 = 11 », « aware » et autres folies du genre. Jean-Claude n’est pas dupe, il sait qu’on se fout de lui, mais il sait également qu’il a de vrais fans, notamment en Belgique, qui savent qu’il est parti de rien, avec seulement quelques dollars en poche et sa maîtrise du karaté. Le long monologue du film, où l’acteur se livre complètement, surprend autant qu’il bouleverse. JCVD dévoile là, soit un excellent travail d’acteur, car la tirade est longue, soit une surprenante maîtrise de l’improvisation. Un speech qui part de nulle part, pseudo philosophique, à la manière de ses célèbres interviews, mais qui, cette fois, est obligé de faire mouche. Obligé car cette fois-ci, nous sommes dans l’ambiance, parce qu’on sait que l’acteur s’y livre, que ce discours n’arrive pas comme un cheveu sur la soupe, et, chose surprenante, qu’il est étonnement humaniste et, j’ose le dire, beau.

Bien ce film alors ?

Oui, vraiment. JCVD est un bon film. Peut-être pas le meilleur du monde, avec quelques défauts et approximations, mais une véritable bonne surprise. Un recul étonnant de Jean-Claude Van Damme par rapport à sa propre vie. A aucun moment, (je vais spoiler un peu, désolé), Jean-Claude ne se comportera véritablement en héros, ou en maître martial. Pas de coup de pied retourné, pas de grand écart et de mawashi geri dans les gencives, pas même de scène d’action. Juste un homme face à ses démons. Un film dans lequel la prise d’otage devient, finalement, l’allégorie de la vie de JCVD, prisonnier de sa propre image.

Alors voilà, vous ne ressortirez pas de ce film changé ou bouleversé, mais il se pourrait qu’il vous touche un peu, qu’il vous fasse rire et que vous passiez un agréable moment. Et pour ça, je ne peux que vous conseiller chaudement de le regarder.