Si je te parle de Défense Sicilienne, de Clouage, d’Ouverture ou encore de Blitz, non, je ne t’énumère pas différentes positions sexuelles mais te présente plutôt des techniques et des stratégies que l’on retrouve dans ce que l’on nomme « le roi des jeux ». Les échecs, c’est en effet l’un des thèmes principal de la série : Le Jeu de la Dame, (The Queen’s Gambit dans sa version originale) excellente série disponible sur Netflix.
Pions et pillules
Tout débute avec l’héroïne, Beth Harmon, réveillée en sursaut dans sa chambre d’hôtel, après une grosse chouille soirée, et très attendue pour une grande partie d’échecs apparemment très médiatisée. Sans aucune autre info, la série nous propose ensuite un grand retour en arrière, avec cette même héroïne, enfant, survivante d’un terrible accident de voiture qui a coûté la vie à sa mère. Beth se retrouve alors dans un orphelinat américain des années 1950, avec tout ce que ça implique d’éducation stricte, de drogues pour calmer les enfants et de directrice acariâtre. Pas vraiment fan des rapports sociaux, elle trouve son salut en observant, par hasard, le concierge de l’école, jouer aux échecs dans la cave. Commence alors pour elle une double addiction. Aux échecs, d’abord, puisqu’elle comprend rapidement les rouages de ce jeu en se liant d’amitié avec ce professeur improvisé. Aux drogues, ensuite, puisqu’elle développe une profonde addiction aux pilules « pour dormir » qui sont délivrées aux enfants de l’orphelinat : aaaah, l’Amérique. Ces deux amours, intimement liées, continueront de grandir tout au long de la série, puisque Beth va gravir les échelons de la hiérarchie de cet étrange univers que sont les échecs, et va aussi continuer de prendre ces petites pilules magiques avec un gros penchant pour l’alcool.
Mention spéciale pour la jeune actrice qui incarne la jeune Beth, excellente également !
Perfection
Je pourrais, petit lecteur aux doigts d’argile, te bassiner pendant de longues heures sur l’histoire, les rapports étranges, profonds et ambigus qui se tissent entre les protagonistes, mais je risquerai de te spoiler et de perdre mon temps en exemples trop concrets.
Car s’il faut retenir une chose de cette série, c’est la surpuissante de sa réalisation. Voici une série extrêmement bien ficelée, avec des plans magnifiques s’apparentant parfois à de véritables tableaux tant leur esthétique est parfaite, et centrée sur une actrice, Anya Taylor-Joy, impeccable dans son double rôle de sociopathe qui ne se plait que dans les échecs où elle peut tout maîtriser et de femme fatale qui minaude dès qu’elle s’assoit pour jouer. Autant sublime dans ses victoires que lamentable dans ses déchéances, elle porte à elle seule la série, bien que celle-ci possède d’autres acteurs tout aussi formidables.
Shonen des échecs
Casting, esthétique et histoire parfaite, la série se permet le luxe d’apporter une dimension quasi épique à son essence même. Qui aurait pu croire que je me passionnerai pour un jeu dont je ne connais pratiquement aucune règle ? En faisant (très bien) mine de faire semblant de placer des coups extraordinaires, les acteurs rendent les parties fabuleuses, et même si l’on n’y comprend rien, le simple fait de voir les pièces bouger sur l’échiquier réussit à créer un dynamisme certain.
Dans le genre « j’ai un look de merde au début de la série, et à la fin je suis sublime »…
Le parcours de Beth, qui commence tout en bas de l’échelle, et finit tout en haut (je te spoile pas Gisèle, les 30 premières secondes de la série te la montrent photographiée par mille journalistes avant son match du jour), m’a très rapidement fait penser à un shonen, ce type de manga bien connu où le héros progresse peu à peu dans son aventure en devenant de plus en plus fort et en rencontrant des adversaires de plus en plus coriace. En ce sens, on pourrait très facilement rêver d’une adaptation animée, ne serait-ce que d’un point de vue scénaristique et esthétique. L’évolution physique de Beth, d’abord miteuse, puis de plus en plus belle et glamour et ses rencontres contre des adversaires de plus en plus fort, tour à tour champions régionaux, nationaux et internationaux, transforme une humble série qu’on pourrait croire historique (même si Beth est un personnage fictif) en une véritable épopée. Chaque adversaire est plus fort, plus coriace, plus charismatique, en témoigne le champion des Etats-Unis et son style vestimentaire singulier.
Le champion des USA et son style bien à lui…
Oui
Définitivement, The Queen’s Gambit est une excellente surprise qui m’aura intrigué au départ, ayant peur de me retrouver face à une série trop dure et trop centrée sur la drogue et ses ravages, puis rapidement happé dans son intrigue. Toujours disponible sur Netflix, je ne saurais que trop vous conseiller de la regarder, que vous soyez ou non fan des échecs. Ou de drogue. Ou encore des années 50/60 parce que ouais, la série se passe à cette époque, et, comme dirait Michel « on s’y croirait ».
Et peut-être que je suis un peu amoureux d’Anya Taylor-Joy aussi.
Allez, on se laisse avec le trailer.
The Queen’s Gambit | Official Trailer | Netflix – YouTube