On peut dire que le dernier Houellebecq a fait parler de lui. Véritable pamphlet islamophobe pour certains, extraordinaire récit d’anticipation pour d’autres : il me paraissait judicieux de me faire un avis.
Qui plus est, je n’avais jamais lu Michel. Et puisque, il faut l’avouer, il me paraissait plus agréable de le lire que de voir son étrange visage à la télévision, j’ai pris mon courage à deux mains et je me suis lancé dans le sulfureux Soumission.
Le sujet
Il n’est pas faux de dire que Soumission est un roman d’anticipation. L’histoire se déroule en France, en 2022, lors de nouvelles élections présidentielles. Le postulat de départ est simple : le second tour va opposer le Front National face aux Frères Musulmans. En avançant un peu dans le livre, et, puisque de toute façon, tout le monde a parlé du bouquin en le spoilant au tiers de la lecture, sachez que, rapidement, suite à divers évènements, ce sont les Frères Musulmans qui arrivent au pouvoir.
On y suit donc les tribulations d’un anti-héros, professeur de fac à Paris III, spécialiste de l’auteur Huysmans, dépressif et sa découverte d’une France gouvernée par un partie religieux musulman, tentant d’y trouver sa place avec pour toile de fond, une recherche sur le parcours de Huysmans, à la limite de la comparaison de vie. Et puis… Et puis c’est tout.
Le phénomène
Du coup, difficile de comprendre l’excitation autour du bouquin. Certes, il est plaisant à lire, car Houellebecq a une belle plume, bien qu’on n’assiste pas pour autant à de grandes envolées lyriques. D’un point de vue technique, le roman est agréable, mais pas transcendant. Les passages résolument pornographiques, arrivant souvent comme un cheveux sur la soupe, ne choqueront pas grand monde et ne servent pas vraiment l’intrigue. De même que la sous-lecture avec la vie de Huysmans, étrange fil rouge qui sert de vernis culturel aussi inutile que lourd.
Du côté scénaristique, le gros défaut du bouquin est de proposer une histoire qui se veut crédible, mais qui se permet des raccourcis et des approximations qui faussent grandement la donne. Le postulat de départ, l’analyse d’une France présidée par les Frères Musulmans est intéressante, mais elle manque cruellement de crédibilité. Du coup, difficile de comprendre l’engouement pour ce roman et le battage autour. Ni crédible, ni vraiment moralisateur, car l’auteur ne prend pas vraiment parti…
Le malaise
Et pourtant, le malaise est palpable. Palpable, et ce, sur plusieurs strates. Déjà, parce que le lecteur ne ressort de ce livre ni grandi, ni révolté, ni terrifié. Tout comme le héros, il assiste à une évolution historique fade et peu crédible, non dans sa possible existence, mais dans son interprétation.
Un malaise également plus indicible s’installe. Une vision pas vraiment islamophobe, pas vraiment misogyne, mais un peu quand même. Difficile à décrire, tant l’auteur semble prendre de la distance avec son propre texte, mettant quand même en avant certains points étranges, qui déstabilisent sans pour autant provoquer de débat. Et c’est peut-être là le véritable problème.
Sans enjeu et sans intérêt, Soumission aurait pu être un véritable brûlot, il n’est finalement qu’un médiocre feu de paille.