Ils sont là, à brandir leurs armes, fiers et victorieux. La dépouille du dictateur gît à quelques mètres. Un quotidien fait de violence, de peur, de vengeance. On peut haïr tout ça, mais on peut le comprendre. On peut se dire que ses hommes agissent pour leur liberté, on peut s’inquiéter du futur de leur pays et des mains qui le contrôleront, pas forcément plus belles que celles qui ne le gouvernent déjà plus.

Mais nous, dans nos pays dits « en paix » (oserais-je dire « civilisés »), on arrive à faire circuler les vidéos les plus ignobles, et d’aucuns se réjouissent de la mort d’un tyran, certes, mais d’un homme tout de même. Les vidéos font le tour de la toile, les journaux télévisés les rediffusent, puis, après les avoir montré à tous, à une heure de grande écoute, font des sondages téléspectateurs pour savoir s’il faut ou pas montrer de telles images.

N’importe quel enfant peut avoir accès à ces chaînes de télé, banales, et voir, en direct, la mort d’un homme. A côté de ça, les chaînes porno demandent un code parental. Elles ne sont bien sûr pas bonnes pour l’éducation d’un môme, mais certainement moins pire que la mort d’un humain, en direct, dans un bain de sang.

Qui est le plus barbare, celui qui tue dans un climat de haine, où celui qui le constate froidement et s’en lave les mains ? Qui est le plus vulgaire, celui qui braille dans le métro, l’haleine avinée, ou le présentateur télé dans son costume trop bien repassé, qui nous remontre les mêmes images sans sourciller ?

Drôle de monde.