Le CMV : de l’enfer à l’espoir.

CMV. Trois lettres qui vous paraissent anodines, mais qui nous ont fait frémir pendant 9 longs mois. Derrière ces initiales se cache une infection : le cytomégalovirus. Totalement bénin, il devient beaucoup plus grave lors d’une grossesse. 

J’espère que mon témoignage pourra informer un maximum de personnes et surtout, surtout, donner beaucoup d’espoir aux parents pour qui le diagnostic tombe un jour, froidement, comme ce fut le cas pour nous. Car sur le coup, on ne rigole pas du tout.

Le CMV c’est quoi ?

C’est une infection de la famille de l’herpès, assez anodine en apparence.  Elle se manifeste par un petit rhume, un peu de fièvre, (voire parfois, rien du tout) et est véhiculée par la salive, l’urine, le sperme, etc. Ce sont surtout les enfants de moins de trois ans qui sont porteurs, bien que le virus soit anodin pour eux. Mais pour les femmes enceintes, c’est bien plus grave.

En cas d’infection au cytomégalovirus, l’embryon peut développer de très sévères complications. Allant de la surdité, à des retards de croissances, mentaux, voire carrément une non viabilité du fœtus.

Le dépistage du CMV, via une prise de sang en début de grossesse, n’est pas systématique. Notamment parce qu’il n’existe pas, du moins pour l’instant, de traitement de la maladie, même si des avancées très intéressantes semblent arriver, dont un traitement en cours de mise en place à l’Hôpital Necker. En cas de détection du cytomégalovirus, la seule parade est un contrôle extrêmement régulier, à savoir, une échographie tous les mois, à la recherche d’éventuelles malformation.

Tomber de très haut

Je suis resté (c’est étonnant quand on me connait) assez discret sur la grossesse de ma petite Madame. Le CMV en était la raison principale. Comment ne pas tomber dans le défaitisme ? Comment ne pas voir l’univers qui s’écroule ?

Il faut savoir, que Madame et moi attendions Bibou depuis bientôt deux ans. Après une fausse couche, une supposé stérilité de Madame et plusieurs traitements, nous commencions à baisser les bras. Alors, quand nous avons su la bonne nouvelle, j’ai été partagé entre la joie d’être enfin Papa, et la peur de nous voir tomber quelque chose sur la gueule. Et ça a été malheureusement le cas.

L’anxiété, ça me connait, et, malheureusement, c’est parfois prémonitoire. Quelques semaines après la bonne nouvelle arrive la mauvaise : Madame avait chopé le CMV. Nous découvrons la maladie, les risques, on commence déjà à penser à une interruption médicale de grossesse en cas de découverte d’une anomalie. Le moral est très, très bas.

Galérer pour avoir un enfant, c’est pénible au début, et ça devient rapidement très pesant. D’ailleurs, une grosse dédicace aux amis qui sont encore dans la panade  : des millions de bisous à eux, leur tour viendra, je le souhaite plus que tout. Alors, quand on apprend que l’on va enfin être parent, mais que le destin nous remet une baffe derrière avec l’annonce de cette infection, on redescend très vite. Et ça fait très mal.

Le jeu des statistiques

Dans ce genre de situation, n’ayant aucune marge de manœuvre, on s’en remet aux chiffres. Et ils sont paradoxaux, ces chiffres. Par exemple, le risque de contamination de la mère au fœtus est moindre en tout début de grossesse. Par contre, si le fœtus est contaminé à ce stade, les risques de complications sont beaucoup plus graves. Inversement, il est plus facile de contaminer le fœtus en fin de grossesse, mais les complications sont moins importantes. 

On lit donc les pourcentages, on les analyse, et on espère fortement que les statistiques joueront en notre faveur. Parce que, pour couronner le tout, Madame a attrapé l’infection au pire moment : dans la période péri-conceptionnelle. Si Bibou a attrapé lui aussi le CMV, il a des chances d’être très mal. 

Autre facteur « Pile ou Face » : si Madame a chopé le virus avant d’être enceinte, en théorie, les risques sont pratiquement nuls, car elle a fabriqué des anticorps qui protègeront parfaitement Bibou. Si elle a attrapé le CMV après, là, c’est beaucoup moins sympa. Pour ajouter un peu de piment à l’affaire, et malgré un suivi et des prises de sang régulières (notamment en raison du traitement pour avoir un enfant), les laboratoires seront incapables de nous dire si l’infection est arrivée avant ou après la fécondation. Impossible donc de savoir si on doit être confiants ou pas.

Stress, incertitude, sentiment de profonde injustice, peur de se projeter dans cette future naissance : on sent qu’on va passer 9 mois de stress. Comment annoncer la grossesse de Madame tout en sachant que celle-ci peut s’arrêter ? Comment en parler autour de nous à des gens qui n’ont jamais entendu parler du CMV ?

C’est sans compter le positivisme de Madame et l’aide des docteurs.

Les démarches

Je disais plus haut que les futurs parents n’ont aucune marge de manœuvre face au CMV. Ce n’est pas totalement vrai. Outre les différentes échographies à faire, Madame et moi en sommes arrivés à un constat très pragmatique. Nous ne pouvions rien faire contre le CMV. Par contre, nous pouvions ne pas stresser. Et le stress n’est pas bon pour les bébés. Alors, après le choc de la nouvelle, nous avons décidé d’y croire, et de positiver. Oui, c’est vrai qu’avant chaque consultation chez le spécialiste, nous serrions les fesses ; mais, peu à peu, nous avons repris du poil de la bête. Bibou était arrivé en dehors du traitement contre l’infertilité, c’était déjà assez peu probable, on savait donc que ce serait un warrior, alors, il serait warrior jusqu’au bout, et ce CMV ne serait qu’une broutille pour lui. Un pet de mouche.

Le point positif,  c’est que nous avons enchaîné les échographies. Dans un cas « normal », on se limite normalement à trois durant la grossesse : en ce qui nous concerne, nous en avons fait une grosse dizaine, suivant l’évolution de Bibou de fond en comble. C’était l’occasion de le retrouver, de le voir grandir au travers d’échographies 3D assez impressionnantes.

Le point négatif, outre le stress de chaque rendez-vous avec le spécialiste, c’est le côté onéreux des consultations, mal remboursées par la sécu et notre mutuelle. 150 euros d’échos par mois, ça pèse.

Chaque consultation durait une bonne demi-heure, pendant laquelle l’échographe observait, sans un mot, chaque parcelle de Bibou, notamment son cerveau, puisque les plus gros risques viennent de là. Attente, goutte de sueurs et cœur qui se noue à chaque fois qu’il plisse les yeux et zoom sur l’image pour vérifier quelque chose. La moindre observation devient terrifiante, comme ce jour où il découvre une légère asymétrie des ventricules du cerveau : un détail anodin mais à surveiller en cas de suspicion de CMV. Un détail qui restera, heureusement, un détail, mais qui ne m’empêchera pas d’aller faire un tour sur internet, histoire d’augmenter encore plus le stress…

Peu d’infos

Parlons-en d’Internet. Comme toujours avec les problèmes de santé, on lit tout et son contraire, et ça s’applique avec le CMV. Bien sûr, il y a ces cas terribles comme ce jeune papa qui perd son fils après 15 jours de vie, et qui, grâce à son message, a réussi à « démocratiser » un peu plus le CMV. Il y a ces témoignages de parents qui perdent leurs enfants, mais aussi ceux qui sont passés au travers de la maladie. Difficile de faire un ratio sur Internet, car on raconte plus souvent ses problèmes que ses joies.

L’intérêt de cet article est aussi de faire comprendre aux parents qui apprennent la mauvaise nouvelle que le CMV n’est pas une fatalité. D’une part, parce que les traitements arrivent, d’autre part, parce que, même si les décès et les handicaps sont malheureusement bien réels, la majorité du temps, tout se passe bien.

Happy End

Vendredi dernier, la maternité nous a appelé. Bibou avait déjà passé plusieurs tests complémentaires, notamment un fond d’oeil très destabilisant pour lui comme pour nous. Imaginez un écarteur dans la paupière de votre nourissons avec une ophtalmo qui braque une lumière dans son oeil pendant de longues minutes pendant qu’il hurle… Horrible.

Bref, cet appel concernait le test le plus important, à savoir le test salivaire, celui qui nous disait précisément si oui ou non le CMV était présent chez Bibou. Les nombreuses échos nous avait rassuré, sa taille et son poids aussi (le CMV fait des petits bébés), les quelques prises de sang et le test de surdité aussi, mais là, c’était le point final de cette (més)aventure. Encore une écho transfontanellaire (un nom qui fait rêver…) à faire, pour la forme, mais nous sommes en droit d’être, désormais, totalement confiants puisque ce fichu test salivaire s’avère négatif au CMV. Ouf. Putain. OUF.

Je me répète, mais j’espère du fond du cœur que des parents dans la même situation que nous pourrons trouver du réconfort dans ces quelques lignes. J’espère également que les parents n’ayant pas eu la même chance arriveront à trouver les ressources pour repartir de l’avant. Dernier espoir : que la recherche avance, et que cette infection de merde puisse être mieux diagnostiquée et surtout, définitivement soignée.

Capture d’écran 2017-06-28 à 08.18.22

FUCK LE CMV


12 Comments

  1. Laurène juin 28, 2017 6:24  

    Vous avez du en baver tous les deux pendant tous ces mois de grossesse, à attendre un verdict.
    Mais, wouah, ce petit Flavien, maintenant plus d’incertitude, c’est un warrior.

  2. ANNICK janvier 18, 2018 5:37  

    et bien, on ne s’imaginait pas tout ça…tellement vous étiez heureux!quel courage d’avoir traversé ça!
    mais quand on voit Flavien, on est rassuré!
    ce petit bonhomme est un vrai bonheur!
    bisous à vous trois!
    merci pour ce témoignage très fort!

  3. Jean Marc janvier 18, 2018 8:41  

    Merci pour se témoignage très fort et maintenant bonne route à vous trois bises

  4. Youness juillet 1, 2018 12:47  

    Mon cher Flo.
    Ton témoignage, en plus d’être très émouvant, est aussi très instructif et donne des forces.
    Je découvre un peu hagard toute cette épreuves que vous avez traversé avec dignité et courage.

    Bug up a toi et cette pauvre Géraldine. Bibou à les meilleurd parents qu’il faut.

    Et aussi, bien que ça ne pèse plus grand chose dans les consciences aujourd’hui, merci à Dieu de vous avoir protégé

  5. Caliken juillet 1, 2018 1:11  

    Je pense que ça ne pèse plus grand chose dans les média et la bienpensance bobo parisienne, mais pas dans la majorité des gens, ni la mienne. On en a brûlé des cierges, et fait des prières, avant et après 😉

  6. Sandrine octobre 30, 2018 12:59  

    Bonjour ,
    Je viens de tomber sur votre article , qui à vrai dire me fait beaucoup de bien à lire.
    Nous n’avons pas autant galéré pour la conception mais il est vrai qu’une fois que l’ont sair que l’on attend un enfant, il est difficile de se dire qu’on pourrait le faire partir !
    Première prise de sang , deux semaines après la conception donc et verdict je suis positive au CMV, maladie que je connais extrêmement bien car je travaille en classe d’accueil (2,5-3 ans) en école maternelle !
    Je travaille depuis 6 ans et je ne l’ai jamais contracté , il a fallu juste avant, durant ou juste après la conception que je la contracte.
    Le ciel me tombe sur la tête ! Que faire ? Interruption de grossesse pour éviter tout risque et tout recommencer ?
    C’est inenvisageable , nous avons décidé comme vous d’y croire, d’être positif et de se dire qu’il y’a peut de probabilité que notre bébé ait quelque chose !
    Demain nous avons rendez-vous pour notre écho des 8SA, pour entendre le cœur de notre bébé !
    J’espère que notre finalité sera la même que la vôtre !
    Bonne continuation !
    Sandrine

    • Anaïs avril 23, 2019 1:02  

      Bonjour , j’ai découvert son histoire et je suis très contente que tout ce soit bien terminé. Et pour vous du coup comment ça c’est passé ?
      Je suis en pleins dedans . Contracté le cmv en début de grossesse et la je suis dans mon 4e mois, et pour couronner le tout mon gyneco ne trouve pas que ce virus soit grave !

      • CaliKen avril 24, 2019 7:12  

        Bonjour Anaïs,

        Courage pour la suite. Les statistiques sont de votre côtés. Pour la suite, nous avons eu des échos régulières et un suivi quelques temps après l’accouchement pour confirmer l’absence du virus chez notre enfant. Fond d’oeil, prise de sang, test de surdité etc. C’est désormais de l’histoire ancienne.

  7. CaliKen octobre 31, 2018 11:12  

    Bonjour Sandrine,

    Merci pour votre retour. Je croise les doigts pour que tout se passe au mieux. Si vous êtes dans la région parisienne, je crois que l’hôpital Necker est à la pointe dans le domaine du CMV. Encore faut-il que l’infection soit avérée ce qui est tout de même, statistiquement, souvent rare.

    Belle grossesse à vous, et tous mes voeux de bonheur !

  8. Floriane septembre 2, 2019 3:52  

    Merci pour ce temoignage!! Enfin un message d’espoir sur internet! Dans la meme situation, la douche froide et l’incompréhesion de ce long jargon medical qui sonne le début d’une grossesse eprouvante. Merci et encore bravo pour ce parcours du combattant!

  9. maldonado février 19, 2020 10:37  

    Super, quelle chance pr vs. Nous sommes ds cette mm galere, infection a cmv au 1er trimestre….avez vous passé une amniocentese pdt la grossesse? quel stress…..

    • Caliken février 20, 2020 5:18  

      Non, nous n’avons pas passé d’amniocentèse. Nous avons juste fait des échographies très régulièrement pour vérifier l’évolution.

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